Assemblage #8
Résistances acoustiques
Les artistes d’Assemblage #8 cherchent une hybridation du son et de la forme, autour des propriétés du métal. Le son est ici compris dans son lien synesthésique avec les éléments visuels. Déjà en 1920, Piet Mondrian assimile «une composition de couleurs et de non-couleurs à un rapport musical de sons et de bruits».
Le son peut aussi être un des matériaux de l’œuvre, et utiliser la forme comme support du mécanisme de production pour créer des objets hybrides. Il peut être également induit dans notre perception d’après l’observation de formes qui sont censées produire ou contenir des sons.
Clarice Calvo-Pinsolle écoute le quotidien. Elle le transpose dans des installations qui interrogent à la fois l’espace d’exposition et les mécanismes de perception. Pour cette installation, elle a repris le mode de diffusion sonore des sirènes et hauts parleurs de l’espace public. Elle l’a adapté à l’espace d’exposition. Sa composition utilise des sons ténus, des nappes sonores qui se croisent et dialoguent ensemble. Chaque pavillon de l’objet diffuse des sonorités particulières qui composent un paysage mouvant de sons électroniques et synthétiques.
Les dessins gravés sur cuivre appelés Hybrides évoquent le son par leur forme. L’artiste a collecté un ensemble de schémas de moteurs et d’éléments allant d’une cornemuse à un pot d’échappement pour les recomposer afin de créer des sortes d’instruments qui amplifieraient sa propres voix.
Comme un diorama, la sculpture de Leonardo Trombetta, évoque une scène mythique ou de science fiction qui traiterait de l’origine de la conscience. Une conque amplifie le son de la gesticulation théâtrale. Pour cette pièce, il a travaillé avec des techniques traditionnelles de joaillerie et fonderie. Il choisit le cuivre pour sa qualité alchimique et symbolique en tant que métal vil à transmuer, ou comme représentant de Vénus.
Romina Salem Taborda a décomposé le fond et la figure de ses peintures en deux surfaces distinctes. Le brillant du métal est le substrat lumineux inhérent à l’entourage de la figure. La matière de la peinture est ce qui apparaît comme objet à nos yeux. Cette matière picturale prend son origine dans un exercice de perte de contrôle. Elle s’y propose d’utiliser des «palettes à peindre» qui ont servi à sa série des Jardins où le fond doré et la matière picturale qui représentent l’objet sont intégrés dans une même surface. A partir de cette décomposition d’éléments, elle assimile la surface brillante à des sons continus, proches du silence : la vibration continue du bol tibétain, un ostinato continuo, ou l’accord de base qui soutien l’improvisation des instruments de jazz.
Tous les trois utilisent le métal comme contenant des vibrations de l’air, comme support des formes génératrices des sons, censées nous atteindre grâce à sa capacité de conduction.
Space in Progress, octobre 2017